Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Cosmo-Poli.Entre critique de cinéma, musique du moment et instants photographiques. Laissons entrer la poésie et l'inspiration.
22 janvier 2012

Objectif Bac(K)

Commentaire de texte « Fleurs et Couronne » de Jacques Prévert :

 

« Je vois une objection à tout effort pour améliorer la condition humaine: c'est que les hommes en sont peut être indignes » M. Yourcenar extrait des Mémoires d' Hadrien(1951). Cette citation nous permets d'esquisser la vision amer que Jacques Prévert porte sur ses compatriotes et plus largement sur le monde qui l' entoure. Ces critiques assassines sur la société du Xxe siècle sont multiples, Yourcenar réalise en cette citation un résumé judicieux du regard que porte Jacques Prévert sur le monde ruiné par la guerre qui l'entoure. Né le 4 Février 1900 à Neuilly- Sur- Seine. Décrit comme un enfant heureux, angoissé par le malheur qu'incarne l'emprisonnement, préoccupé par la misère qui l'entoure. Durant son enfance, son père l'enmmène côtoyer les miséreux, il voit en eux une énorme générosité et une richesse inouïe. Le personnage de Jacques Prévert commence à se dessiner. Pendant toute son enfance, l'école est un vrai fardeau pour le petit Jacques, soit en retard soit partisan de l'école buissonnière, il va quitté les bancs de l'école définitivement en 1914, avec le certificat d'étude en poche. Son univers tout entier est baigné dans la création, la critique et l'imagination. Son père est critique dramatique, il enmène ses fils aux représentations théâtrales, bénéficiant du privilège d'un accès aux loges. Son petit frère, Pierre entame une carrière de metteur en scène, d'ailleurs Jacques, en écrira les dialogues et parfois les scénarios. Sans étonnement aucun, Jacques prends donc le chemin d'une carrière d'auteur au moment où la première guerre mondiale explose, ce qui le débecte au plus haut point. Les lignes directrices de la pensée de Jacques s'installent, révoltés contre la bêtise humaine, contre l'ordre établi, contre les clercs et l' Eglise qu'ils incarnent. Ironie du sort ou non, il est obligé d'intégrer les rangs de la marine, militaire peu discipliné, il va fréquenté bon nombre de fois la prison, qu'il déteste tant. Ses premières publications apparaissent en 1943, ce sont des livres dédiés aux enfants. Son receuil Paroles est publié en 1946, Fleurs et Couronne en est un extrait. Par son contexte, ce poème est donc le reflet d'un monde en reconstruction après avoir essuyé deux guerres. Déjà très critique à l'égard de l'affrontement, Prévert baigne sa plume dans le sarcasme et le cynisme et nous offre une vision altérée de l' Homme. On peut donc se demander, en quoi l'image de la fleur, c'est à dire la Pensée, reflète t-elle l'âme humaine selon Jacques Prévert à son époque? Il est judicieux de voir le poème sous plusieurs angles, notamment philosophique voir sociologique. Cependant, dans des termes strictement littéraires, ce poème nous permets de mettre en lumière bon nombre de procédés qui nous offrent différentes clefs de lecture possible. On pourra s'attarder sur l'évolution de l'image de la Pensée à travers le temps, puis mettre en lumière, la critique acerbe de la race humaine et enfin, une forme d'enlisement de cette Pensée.

 

Tout d'abord, le poème de Prévert, de façon purement esthétique apparaît désordonné. L'exemple le plus probant, lorsque l'on dénombre les pieds aucun n'est égal ou ne possède un rythme bien définit. De ce point de départ-ci, il est intéressant de s'interroger sur la progression qui se trouve au sein du poème. Il est possible de subdiviser la réflexion en plusieurs thèmes. On verra que le poète s'arme de la conjugaison pour distinguer plusieurs périodes, mais aussi, que cette évolution suit une réflexion profonde sur l' Homme.

 

Dans un premier temps, on peut distinguer trois découpages au sein du poème. Cette distinction est possible grâce à un enchaînement logique de temps. Le début du poème est inscrit dans le passé avec l'utilisation à plusieurs reprises de l'imparfait, notamment aux vers sept, onze et treize. Le passé composé est aussi beaucoup utilisé « Tu l'as appelée Pensée » vers 5, ou « Tu as donné » vers 15, ou encore « Tu les as appelées » au vers 10. Cette multitude de symboles du passé nous permets de distinguer une période bien claire, qui apparaît antérieur pour l'auteur.

 

Cependant, le vers 17 fait apparaître un élément du temps immédiat, le verbe « être » conjugué au présent. On peut donc y cerner un second découpage, comme une histoire raconté à un enfant, l'histoire avance et cela grâce au temps conjugué de différentes manières. Le poète emploie le présent lorsqu'il décrit le soleil, on peut y voir une certaine aude à l'espoir.

Enfin, c'est au tour du lecteur de ressentir une sorte de fin inéxorable et inéluctable, un malaise s'installe entre le lecteur et le poète. Le verbe « vouloir » conjugué au futur au vers 58 installe cette atmosphère instable. Ces trois découpages ne sont pas anodins dans la dimension que le poète cherche à esquisser. Bien plus que des périodes strictement temporelles, le poète décrit une réflexion profonde et de plus en plus alambiquée.

Dans la première partie du poème, on constate que la vision exprimée par le poète est simpliste, comme une contine racontée à un enfant. Le rythme du poème reste désordonné mais entraînant. Pourtant cette vision dépeint un regard beaucoup moins enfantin, celui d'un adulte critique envers ces pairs. Au fur et à mesure, le poème s'enfonce dans une réflexion de plus en plus poussée vers une critique.

Dans la seconde partie, le poète s'attarde sur la dénomination du Soleil, « Hélianthe » au vers 30, c'est le nom attribué par les savants. L'anaphore « La plus », nous permets de dégager un point important du poème. Comme si l' « Homme » apostrophé au vers 1 prenait conscience des choses mais pour autant ne voulait pas s'en préoccuper. « Ils se promènent en regardant par terre », Prévert dessine ici, un trait de caractère particulier à l' Homme selon lui. L'Homme est négligeant face à ce qu'il l'entoure. On constate que la seconde partie offre un ton beaucoup plus lourd et moralisateur que la précédente. Prévert dessine peu à peu les travers de l'Homme qui le débecte.

Le dernier découpage du poème est très court, il nous offre à la fois un bilan et nous laisse un peu en suspens. On peut en tirer un bilan plutôt négatif avec l'omniprésence du vocabulaire de la tristesse et de l'amertume tel que « malade » au vers 63, « aigre » au vers suivant ou encore « toujours fanée » au vers 65.

 

 

Ensuite, comme exprimer dans la partie précédente, le poème est cousu de champs lexicaux qui se font l'écho, cela donne un effet paradoxal, ce qui laisse le lecteur perplexe. C'est à travers le poème que l'on peut découvrir une critique acerbe et cinglante de la race humaine à travers le regard de Prévert.

Prévert entame son poème, par une sorte d'apostrophe à l'humanité, « Homme » au vers 1. Cet appel à la majorité jette les bases pour l'analyse du poème. Si l'on va plus loin dans l'analyse, on peut même penser que Prévert fait référence au créateur, Dieu. Surtout lorsque Prévert nous montre comment l' Homme a nommé toutes les fleurs, on le verra de façon plus ou moins réfléchies selon Prévert.

Comme on l'a vu précédemment, on peut diviser le poème en plusieurs parties distinctes grâce au temps utilisé, mais plus encore dans l'écriture. On peut voir que le poète utilise un langage simpliste comme au vers 10/11 « Tu les as appelées immortelles... C'était bien fait pour elles... ». La fatalité malgré le ton simpliste de ce vers apparaît clairement. Comme si ce choix était une fin en soi. Les vers suivants utilisent le même procédé « Mais le lilas tu l'as appelé lilas. Lilas c'était tout à fait ça. Lilas...Lilas... » Ce ton utilisé par Prévert est cynique. On a attribué aux fleurs sans réelle réflexion, sans esprit critique. Prévert ici, se moque.

Au vers 17/18, encore une fois Prévert rit au sujet de l'Homme, en disant qu'il nomme les choses pour le plaisir ou la beauté. « L'essentiel c'était que ce soit joli. Que ça fasse plaisir... » Prévert fait passer l'Homme pour un être simplet dépourvu de sens critique. L'importance des noms attribués à l'univers qui entoure l'être humain passe au second plan, la priorité c'est que ça fasse joli, que ça sonne bien.

Plus encore, Prévert se dégage totalement de cette masse humaine. Le pronom personnel « Ils » est utilisé à foison du vers 40 jusqu'à la fin du poème. « Et ils traînent...ils traînent leurs chaînes. » vers 50. Cette utilisation avec excès de ce pronom personnel permets à Prévert de se dégager de cette masse. Par ce procédé, Prévert prends le recul nécessaire pour critiquer l'Homme. Les sarcasmes de Prévert prennent une place importante dans le poème.

L'antiphrase « ces sales fleurs qui ne vivent ni ne se fanent jamais » située au vers 9 exprime à quel point l'Homme peut s'attacher à des idées et les entretiens sans réellement en connaître l'origine. On peut rapprocher cette réflexion du contexte dans lequel le poème a été rédigé. On sait que le recueil Paroles datent de 1946, c'est à dire la période d'après Seconde Guerre Mondiale. On connaît tous les travers et les dommages collatéraux dont est responsable ce conflit. Prévert fait ici référence au xénophobisme et l'antisémitisme, deux fléaux qui ont touchés l'esprit des Hommes. Les juifs depuis des millions d'années sont considérés responsables de bon nombre de catastrophes et problèmes, ces raisons sont tangibles et peu défendables. C'est à travers ce poème que Prévert veut exprimer la bêtise humaine et surtout le manquement d'esprit critique chez les Hommes.

De plus, Prévert nous offre une certaine classification de la masse populaire, il différencie les hommes, les hommes intelligents et les savants. Ces trois catégories se distinguent par leurs comportements. Les premiers sont ceux qui nomment les choses, les respectent sans réellement savoir pourquoi, « les hommes intelligents » vers 38 disposent d'un esprit critique mais ne s'en servent pas à bon escient, et enfin,« celle que les savants appellent Hélianthe » vers 30, les intellectuels se distinguent des autres par leurs vocabulaires.

 

Enfin, on a pu constaté une critique graduelle au fil du poème, l' Homme et son esprit critique sont concernés. La polysémie du mot « pensée » permets à Prévert d'exprimer cette critique. Prévert pastiche, la fleur appelée Pensée afin de lui donner un sens lié à l' Homme, c'est à dire « la fleur personnelle... La pensée... » vers 66/67. Mais on oublie peut être l'essentiel, la signification même du titre du poème. « Fleurs et couronne », c'est peut-être une interprétation exagérée, mais comme l'adage « les moutons de panurge » , les « Fleurs » dans ce titre peuvent en être l'image, «  Couronne » à l'opposé peut incarner la supériorité d'un être ou d'une chose sur le reste, la Pensée dans tous les sens de ce terme peut en être à la fois l'incarnation et l'allégorie.

Aux vers 24 à 27, l'expression «  à côté des » est victime d'une anaphore, afin d'insister sur la paradoxalité . Comme déjà exprimé, le champ lexical de la gaieté avec « belle » vers 22,« vivante » vers 28, « brillante » vers 29, cotôye celui du dégoût « fumier de la misère » vers 23  « rouillés » vers 24 « chiens mouillés » vers 25, « éventrés » vers 26, « sous alimentés » vers 27 ou encore « cancéreuse » vers 39. Cette opposition permets à Prévert de pointer du doigt le ridicule et l'atrocité de la réalité. L'Homme apparaît négligeant de ce qui l'entoure. La fin du poème mets en lumière un certain enlisement de la réflexion, comme si la situation n'avait aucune issue. La répétition « traînent » montre que l' Homme avance mais de façon lente et difficile. Comme si l' Homme traînait un boulet derrière lui. L'Homme pour Prévert est prisonnier « dans les marécages du passé » vers 49. Le champ lexical de l'enlisement en est l'exemple le plus probant « boue » vers 46, « traînent » vers 47, « à grand peine » vers 48, « marécages » vers 49, « chaînes » vers 50 ou encore « enliser » vers 53.

Cet enlisement est dû pour Prévert, aux erreurs passées de l'Homme, dont il ne tire pas de leçon. Au vers 46, l'anaphore « Et ils marchent dans la boue des souvenirs dans la boue des regrets », prouve que l'Homme est enfoncé dans son passé et par son manque d'esprit critique ne parvient pas à s'en dégager. C'est pour cette raison que l'Homme avance mais de façon ralentie et « à grand peine » vers 53. On le sait Prévert ne supporte pas l'armée et l'autorité qu'elle incarne. Il y fait notamment référence au vers 51 « Les pieds au pas cadencé » ou au vers 54 « chantent à tue-tête la chanson mortuaire », ces deux références peuvent nous permettre de rapprocher la chanson mortuaire de la Marseillaise et la marche au pas cadencé, celle des militaires lorsqu'ils défilent ou se déplacent.

 

 

 

Ainsi, Prévert dans ce poème nous expose plusieurs points importants. Dans une première réflexion, on constate que le temps des verbes est révélateur dans cette façon de faire évoluer le poème et les idées intrasèques à ce poème. Ces différents temps traduisent différentes périodes graduelles dans le poème. Prévert nous présente d'abord une vision plutôt simpliste de ce qui l'entoure et s'enfonce par la suite dans une réflexion profonde et beaucoup plus pénible. C'est dans une seconde partie, que Prévert nous donne réellement les clefs de sa réflexion. Les champs lexicaux le prouvent, ainsi que tous les procédés stylistiques qu'il mets en avant pour traduire ce qu'il le dégoûte chez l'être humain. Il les classe en catégories distinctes, leur point de divergence c'est l'esprit critique, la pensée, « la fleur personelle ». Ces trois catégories sont les suivantes, les hommes simples et simplets, les hommes intelligents mais qui n'utilisent pas leur esprit critique et enfin, les savants, ceux qui nomment les choses de façon réfléchie. Selon Prévert, l'Homme pense beaucoup et agit peu ou de façon ralentie. Prévert tire un certain bilan du genre humain. Selon lui, l'Homme est enlisé dans « les marécages du passé », il ne parvient pas à s'en défaire, par manque d'esprit critique. Prévert brosse ici le tableau des travers du genre humain. Il explique les dérives humaines par l'absence d'esprit critique, mais aussi par le fait d'être convaincues par des idées instables et parfois non vérifiées. L'Homme s'enlise dans le gouffre des idées reçues, et selon lui, leur bien fondé n'est pas à remettre en question. Fleurs et Couronne nous esquisse le tableau de la société d'après guerre. Un peuple qui ne comprends pas et ne remets pas en question ce qu'il s'est produit. Le choix de la fleur Pensée pour incarner, la pensée, l'esprit de l'Homme permets à Prévert de pasticher ses réelles intentions. En réalité, le poème est une critique violente du genre humain. Prévert remets quelque peu en question la poésie de l'après guerre, mais suit la ligne de conduite de Rimbaud ou de Mallarmé. Dans ce poème, Prévert suggère, laisse au lecteur l'interprétation et la déduction. Selon Gaëtan Picon, la poésie prends un nouvel envol après 1945, avec « le nouveau réalisme poétique ». Il serait intéressant de voir en quoi Prévert se détache de ce genre littéraire mais à la fois qu'il est possible de dire qu'il en fait partie intégrante.

 

Publicité
Publicité
Commentaires
Cosmo-Poli.Entre critique de cinéma, musique du moment et instants photographiques. Laissons entrer la poésie et l'inspiration.
  • Au-delà, d'un récit de vie. Racontons nous des histoires. Inventons un monde d'images et d'effets spéciaux. Artifices et archétypes. Sonorités musicales au creux de mes oreilles. Soyons Désinvolte n'ayons l'air de rien.
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
Archives
Publicité